L'art martial chinois : son influence, ses lacunes

Dans le monde des arts martiaux, l'art chinois est souvent vu de deux manières:

- On le considère, en générale, comme étant à l'origine des autres écoles en Asie.

- On le trouve très axé sur la théorie et peu sur le pragmastisme.

Si la première de ses idées est particulièrement juste - les différentes écoles de l'art martial en Asie sont toutes issuent de la Chine et de l'Inde - la deuxième de ses idées, bien qu'assez discutée, est également juste et ce pour plusieurs raisons.

L'évolution classique dans l'apprentissage d'une école en Chine est la suivante :

- Jibengong : travail des bases ou exercices de préparation du corps (waigong / xing) et de l'esprit (neigong / yi). Ce travail permet de préparer à la maîtrise des principes fondamentaux et des différentes techniques de l'école.

- Travail des formes en solo : apprentissage du répertoire technique propre à l'école. Historiquement, lorsque les techniques devinrent trop nombreuses, la transmission commença à se faire sous forme d'enchainement, ce qui permis d'en retenir un grand nombre et de le faire passer aux générations suivantes au complet.

- Travail des formes en duo : apprentissage des applications propre à chaque technique. C'est la phase ou le pratiquant apprend la "tactique de combat" propre à son école.


Or, cette dernière étape de l'apprentissage s'est quelque peu perdu en Chine depuis la prise de pouvoir des communistes en 1949. Les différentes pratiques martiales furent prohibées à partir de cette époque et, si les formes en solo et exercices de bases pouvaient avoir l'air annodins et donc continuaient à être pratiqués, il en était autre des formes en duo, qui étaient beaucoup plus parlantes et révelaient la pratique d'un art du combat.






Illustration d'une technique chinoise au 18e siècle





Dans le quanfa beiyao (recueil de méthodes de boxes chinoises), datant du 18e siècle, on trouve des techniques illustrées dans des applications très précises. Ce qui vient à prouver que, si l'art martial chinois s'est tourné vers une pratique essentiellement formelle et théorique, il a longtemps été enseigné de manière très pragmatique, tel qu'on le trouve aujourd'hui encore au Japon et en asie du sud est.






Zhang junfeng, de Taiwan, démontrant la force en déplacement puis un enchainement de xingyiquan en duo





Les écoles chinoises ayant voyagé avec la diaspora aux époques antérieures à la révolution culturelle ont, en revanche, conservé ces pratiques. On les retrouve en Asie du sud-est (Singapour, Vietnam, Malaisie, Indonésie, Philippine...) ainsi qu'au Japon. Nombreuses de ces transmissions sont des écoles chinoises classiques s'étant melées aux traditions locales. En Asie du sud-est, la population est fortement impregné de l'immigration issue essentiellement du sud de la Chine, laquelle voyageait en apportant ses boxes (nanquan).






Démonstration de la boxe Taizu du sud (nan taizuquan) par le grand maître Liao wuchang




Les écoles de karate de la région de Naha n'avaient, à l'origine, que très peu de différences avec les écoles chinoises dont elles étaient issues. Okinawa ayant toujours été un térritoire partagé entre les cultures chinoise et japonaise.






Démonstration de la forme sanseiryu par kanei Uechi, fils du fondateur de l'uechiryu karate





La dernière étape de l'apprentissage doit permettre au pratiquant d'apprendre tout le "répertoire technique" de l'école et donc de comprendre la réelle signification des différents mouvements qu'il a étudié au travers des enchainements ou formes.




Démonstration de Silat indonésien, en solo puis en duo





Parmis les écoles chinoises à l'origine des styles d'Asie du sud-est, reviennent souvent les boxes de la grue (hequan), ainsi que celle de la famille hong (Hongjiaquan / hunggar dans sa prononciation cantonaise) et la boxe yongchun, que l'on peut également rattacher à l'école de la grue.






A Paris, didier Beddar transmet le système complet de l'école Yongchunquan (wingchun)





Avec le temps, certaines écoles se sont concentrées essentiellement sur l'aspect pratique et leur travail sur les applications en duo des techniques. C'est le cas du yongchun et des écoles ayant subi son influence (certaine forme de silat ainsi que le kali / escrima de mano).





Du wing chun à l'escrima, l'art du poing chinois a évolué et s'est de plus en plus concentré sur le pragmatisme. Dan innosanto nous explique les motivations qui ont poussé Bruce Lee a creer son jeetkundo.





En yiquan, la pratique des techniques à deux (duanshou) s'est perdu avec le temps et n'est plus enseigné. Wang xiangzhai pensait que les bases représentaient le travail le plus important de l'apprentissage, mais ces bases suffisent-elles à former un artiste martial si elles ne sont pas complétées par des techniques pratiques ?

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