Le Taijiquan de l'école Yang par Liang Dehua

J'aurai l'honneur de recevoir le jeune maître Liang dehua pour un stage inédit qui aura lieu à Paris les 25 et 26 mai prochain. 

Ce jeune expert chinois qui vit en Thaïlande depuis son enfance a su profiter de l'incroyable réseau de maîtres et experts qui tout comme sa propre famille, se sont réfugiés en Thaïlande dans les années 50 / 60. 

De ce fait, le Taijiquan pratiqué par Liang dehua a su préserver la part d'enseignement aujourd'hui quasiment disparu de toutes les écoles présentes en Chine populaire et qui était censé amener le pratiquant à entrer dans la dimension martial de sa pratique. Car il ne faut pas oublier que si le Taijiquan est devenu aussi célèbre dans le monde entier, c'est d'abord et avant tout en tant qu'art de longue vie, et souvent dans une forme de Qigong dynamique, plus qu'en tant qu'art martial, sa vocation première.



Liang dehua exécutant un fali sur un de ses élèves



Les livres publiés par Yang chengfu et Wu jianquan ont permit une diffusion de cette pratique à grande échelle, essentiellement en transmettant la forme et le travail du souffle mais en délaissant la partie martiale qui fut dès lors réservée à certains disciples proches et intéressés par cet aspect de l'art. 

Les années difficiles de la révolution culturelle ont porté une atteinte sévère au savoir qui existait encore en Chine et ce n'est que dans les années 80 que le Taijiquan martial a refait surface en Chine, non sans certaines pertes. 

L'enseignement de la famille Yang s'est standardisé et la pratique de la forme longue en 108 postures est devenu le principal canal de diffusion du Taijiquan en Chine. 

Liang dehua a eu la chance d'étudier auprès de plusieurs maîtres et professeurs les transmissions des frères Yang, chengfu et Shaohou, dont on sait qu'elles furent assez différentes de leur vivant, même si issues des mêmes parents (père et oncle).



Le jeune maître Yang chengfu dans un exercice de Tuishou



On sait que Wang xiangzhai, le fondateur du Yiquan / Dachengquan, fut un proche des deux frères Yang auprès desquels il pu recevoir certaines informations sur le Taijiquan. Dans "Les principes du duanshou en Yiquan" (Yiquan Duanshou shuyao) un ouvrages qui lui est attribué (mais que je considère, pour ma part, comme une ouvrage écrit par le maître Wang xuanjie), le maître s'exprime en ces termes : 


"En étudiant l'histoire des arts martiaux chinois, j'ai découvert une règle : Toutes les écoles sont passée du tigre en acier au tigre en papier.

Par exemple, à ses débuts, le Xingyiquan comprenait seulement trois techniques : perforer, envelopper et piétiner (Zuan, Guo, Jian / 钻,裹, 践). Les générations suivantes, ne les comprenant pas, ont inventé les cinq éléments (wuxingquan / 五行拳) puis les douze formes animales (shierxingquan / 十二行拳 ) ainsi que l'enchainement dit "techniques en postures variées" (Zashichui / 杂式捶 ) et d'autres Taolu.

A ses débuts, le Baguazhang comprenait uniquement le simple et le double changement de paume (Danhuanzhang, Shuanghuanzhang / 单环掌,双环掌). Les disciples des générations suivantes, ne parvenant pas à les comprendre, ont créé la forme des soixante quatre paumes (Liushisizhang / 六十四掌).

Le Taijiquan, quand à lui, ne comprenait que la simple et la double frappe enroulée (Danchanda, Shuangchanda / 单缠打, 双缠打) ainsi que les techniques de « frapper vers le sol » (Jidi / 击地) et « frapper en inclinant le corps » (Pieshen / 撇身). Les générations postérieures, ne comprenant pas les principes qu'elles contiennent, ont développé la forme des cent huit postures (Baibashishi / 百八十式). Si on ajoute à cela la grande division entre les courants du nord et du sud, la sous-division en écoles : Yang, Wu, Chen et Wù... Les pratiquants  de Taijiquan se retrouvent emprisonnés par des enchainements de gestes étranges et autres méthodes insensées qui finissent par étouffer toute spontanéité.

A leur création, les boxes Xingyi, Bagua et Taiji étaient très dynamiques. Comment se fait-il qu'avec le temps, ce dynamisme se soit perdu et continue de se perde de plus en plus ? Et surtout, pourquoi les pratiquants ne parviennent-ils pas à utiliser leur méthode et leurs techniques dans des cas concrêts ? Ce qui est encore pire, c'est que des pratiquants d’arts martiaux sont souvent battus de façon barbare par des non-pratiquants ! La raison à toutes ces dérives est que ces pratiquants ont tous abandonné l'essentiel de la technique en gardant le partiel, conservant le tigre en papier à la place du véritable. Ainsi, petit à petit, le tigre en acier devient un tigre en papier et, de génération en génération, le vrai est englouti par le faux.


J'ai envie de diffuser le Dachengquan dans le but de restaurer l’art qui est à l'origine des techniques."



Jidichui par le maître Zhang dongshi


Ce texte devient particulièrement intéressant lorsque l'on note que l'enseignement de Liang dehua inclut "cinq techniques de poing de l'école Yang de Taijiquan", qui, selon lui, apparaissent dans la forme sous plusieurs noms. Par exemple, le coup de poing descendant "Jidichui" (frapper vers le sol) s'appelle également Zaichui (frapper comme pour planter dans le sol), une technique bien connue des pratiquants de Yiquan de l'école Yao zongxun (et, par extension, de l'école Wang xuanjie qui fut un de ses élèves). La technique Pieshen ou pieshenchui (frapper en inclinant le corps), quand à elle, aurait, toujours selon Liang dehua, été une des favorites de Yang shaohou. On la retrouverait dans certains enchainements sous le nom de yinyangchui (coup de poing yinyang) et il existerait même un enchainement ainsi nommé qui serait encore pratiqué dans certaines lignées descendant de Yang shaohou et de Tian Zhaolin (un des meilleurs disciples de Yang chengfu).



Le maître Tian zhaolin dans un exercice à deux (Sanshou)



C'est donc une pratique du Taijiquan en tant qu'art martial, tel qu'il était enseigné avant sa standardisation que propose Liang dehua. Ceux qui souhaiteront venir découvrir cette pratique et les principes qu'elle véhicule (et qui sont les mêmes que ceux recherché par la pratique Yiquan), pourront  se joindre au stage qui aura lieu à Paris le 25 mai au matin et le 26 mai toute la journée. 

Liang dehua y abordera, bien sur, les principes essentiels à la pratique du Taijiquan en tant qu'art martial mais également certains exercices à deux (Tuishou / Roushou) ainsi que les cinq techniques de poing de l'école Yang.



Renseignements et inscriptions : liangdehua.paris@gmail.com




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